Bienvenue chez toi Camille....

Publié le par la cachette d'Emma

Enfin, te voilà chez toi Camille. Enfin tu as un lieu, avec ton nom, avec tes œuvres, dans la ville même où tu as été découverte, là où ton destin de sculpteur a été révélé, là où tu as caracolé pour aller chercher de la terre dans les petits matins brumeux de l’Aube, où tu as parfois ri avec ton frère Paul, où tu t’es parfois, si souvent ? trop sans doute ? disputé avec ta mère qui ne voyait en toi qu’une jeune fille rebelle et impétueuse qu’il serait bien difficile de modeler comme il faut et qui ne parvenait pas à t’aimer complètement à défaut de te comprendre un peu.... Te voilà chez toi Camille, enfin. Ta vie n’a pas cessé d’alimenter les théories, les questions, les supputations, les récupérations diverses et variés : étais tu vraiment folle ? Avais tu de vrais troubles ? Etaient-ils authentiquement psychiatriques ou justes de circonstance afin de te « canaliser » et de ne plus trop t’avoir sous les yeux ? L’époque n’était pas tendre avec les femmes qui avaient peu d’inclination à se corseter l’esprit et le cœur, ni avec les artistes en général qui ne suivaient pas ce terrifiant et anxiogène « droit chemin ».

Victime tu l’as été. Mais comme pour toute victime, une fois reconnue, est ce judicieux de toujours s’appesantir sur le sujet ? De toujours ne les définir que dans leur statut de victime, comme si rien d’autre ne pouvait leur arriver. Comme si elles ne pouvaient elles -mêmes rien faire d’autre que d’exister en tant que cela…Aujourd’hui, ton histoire te revient, tout comme ta place dans l’histoire de la sculpture. Aujourd’hui, ce sont tes œuvres qui vont témoigner et elles seules. Et c’est sans doute le plus vertigineux des hommages. Celui que tu aurais souhaité, celui qui est le tien avec l’ouverture de ce musée. Aujourd’hui, c’est la puissance fébrile de tes sculptures qui interpellera le public, la beauté évanescente d’une épaule, d’un profil, d’une main tendue vers l’ailleurs qui bouleversera, ou encore le mouvement à l’élégance chavirante, que tu savais tellement saisir au moment le plus troublant qu’est celui du déséquilibre. C’est tout cela qui fera frémir et rien d’autres. Tu es parvenue à inscrire toute la fragilité et l’indicible des émotions, à fixer toute l’impermanence du mouvement dans le matériel le plus hostile qui soit : la pierre.

Tu as été cette comète étincelante qui a fendu l’armure des conventions, artistiques, sociales et qui sait, sans doute aussi humaines. Bienvenue chez toi Camille, bienvenue dans ton musée et pardonne à ceux qui prennent la liberté de te tutoyer. Comme le pensait Jacques Prévert, on dit souvent tu à ceux qu’on aime…

Le Musée Camille Claudel a ouvert ses portes au public  le 26 mars 2017 à 11h.  Cette même semaine, on fêtait le centenaire de la mort d'Auguste Rodin...Hasard du calendrier sans doute et pourtant...On pourra dire que ces deux êtres-là que la vie dans tout ce qu'elle peut parfois avoir de monstrueux, a séparé, resteront toujours unis par deux forces au moins aussi puissantes que l'est la vie: l'Amour et la création artistique...

Le Musée Camille Claudel, 10 rue Gustave Flaubert, 10400 Nogent-sur-Seine, est ouvert du1e avril au 31 octobre du mardi au dimanche de 11h à 18h. Du 1er novembre au 31 mars du mercredi au dimanche de 11hà 18h.

 

 

 

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